7 mars 2023 – Dans le cadre des activités mondiales pour la Journée internationale de la femme 2023, Indigenous Peoples Rights International (IPRI) et le Forum international des Femmes autochtones (FIMI) ont organisé le webinaire « Femmes autochtones défenseures des droits : histoires du front et le chemin qui reste à parcourir », avec l’objectif de revenir sur les réalisations et les luttes qu’elles ont entreprises pour la défense de leurs droits individuels et collectifs.
Selon le rapport « Décennie de résistance » de Global Witness, 40 % des personnes assassinées pour défendre leurs droits depuis 2012 étaient autochtones. De plus, une personne sur 10 était une femme. Les Femmes autochtones assassinées défendaient leur identité, leur langue, le territoire ou les ressources naturelles qui permettent à leurs peuples de vivre.
Lors de l’ouverture du séminaire, Teresa Zapeta Mendoza, femme Maya K'iche du Guatemala et directrice générale du FIMI, a expliqué que les Femmes autochtones défenseures ont formé des réseaux de soutien pour tenir tête à la persécution, aux violences physiques, psychologiques et sexuelles, et aux assassinats. « Nous avons organisé cette rencontre pour écouter les problèmes auxquels font face nos sœurs défenseures autochtones à travers le monde, connaître leurs expériences et entendre leurs voix. Nous espérons également partager nos histoires de changement, nos bonnes pratiques, et toutes ces contributions qui restent souvent invisibles », a-t-elle énoncé.
Cristina Coc, leader du peuple Maya Q’eqchi du sud du Belize et coordinatrice du plaidoyer international de l’IPRI, a souligné que les organisatrices du webinaire cherchaient à « sensibiliser aux réalisations et aux difficultés rencontrées par les Femmes autochtones dans leur défense des droits environnementaux ». Elle a souligné certains points fondamentaux contenus dans la Recommandation générale 39 (RG39) de la CEDEF, qui est un instrument clé pour la protection des Filles et des Femmes autochtones qui défendent leurs droits à travers le monde.
L’événement a réuni Zahia Bachir Raab, du peuple Amazigh en Algérie, qui a raconté comment elle avait été persécutée et emprisonnée pour son travail en faveur de la protection de l’environnement et de la sensibilisation qu’elle mène auprès des habitants du village d’Iguarsafene; Jean Roch, de la tribu Lakota du Dakota du Sud, aux États-Unis, survivante de la persécution de 1975 contre les autochtones Sioux, qui a dénoncé les meurtres qui continuent d’être perpétués en toute impunité, ainsi que les accusations fabriquées de toute pièce contre les Peuples autochtones; Anabela Carlon, avocate et défenseure du peuple Yaqui, au Mexique, qui pour sa défense du territoire – convoité par des sociétés transnationales, des gouvernements et des groupes criminels –, a été kidnappée et a vu ses compagnes et compagnons emprisonnés, assassinés et disparus; Kara Lenina Taggaoa, de la communauté Miruscaliga aux Philippines, porte-parole nationale de la Ligue des étudiants des Philippines, qui a subi des attaques constantes en plus de voir ses parents arrêtés pour leur travail en défense des droits de la personne; et MC Millaray, jeune militante et rappeuse du peuple Mapuche au Chili, qui se sert de sa musique pour canaliser cinq siècles de lutte autochtone dans son pays et récupérer l’usage de sa langue.
« La participation des défenseures à l’événement montre que les droits des Femmes autochtones défenseures sont continuellement bafoués. Elles sont systématiquement menacées, criminalisées et assassinées et, vu la discrimination institutionnelle qui prévaut dans leurs États, il leur est difficile d’accéder à la justice », a déclaré Joan Carling, militante Kankana-ey Igorot des Philippines et directrice générale d’IPRI. « La RG39 est un outil international contraignant qui reconnaît que les femmes font face à ces risques et d’autres encore dans la défense de leurs droits individuels et collectifs. »
Comme l’a souligné Joan Carling, la Recommandation oblige les États à reconnaître et à protéger les Femmes autochtones pour leur travail de défense. « Les autorités doivent garantir leur accès à la sécurité et à la justice afin qu’elles ne subissent pas de représailles pour protéger leurs territoires. Cela doit être accompagné des politiques publiques, des programmes et des budgets correspondants. » Elle a également indiqué que « nous traversons à l’échelle internationale une crise de violences à l’encontre des défenseures autochtones qui doit être traitée de toute urgence et de manière solidaire ».
En guise de conclusion, Teresa Zapeta a souligné que « quand nous parlons, nous ne parlons pas uniquement de nous-mêmes. Nous parlons avec la voix de nos ancêtres, nous parlons avec la voix de toute notre lignée. » Concernant le rôle des aînées, elle a souligné : « Toutes les expériences rapportées dans ce panel révèlent un parcours de vie commun, dans lequel nos mères et d’autres femmes ont été des référentes et des promotrices de nos processus de défense et de leadership. » Elle a déclaré que la création de réseaux de soutien et la construction d’une solidarité entre alliées autochtones et non autochtones est une tâche qui nous correspond à toutes et à tous en cette ère de nouveaux colonialismes. Pour conclure, elle a souligné : « La défense de nos droits et territoires est la fondation qui permet la guérison spirituelle et physique des Peuples autochtones de toutes les régions. »