Lettre ouverte sur l'adoption de la déclaration de position du Conseil international des mines et métaux (CIMM) sur les peuples autochtones et l'exploitation minière

Lettre ouverte sur l'adoption de la déclaration de position du Conseil international des mines et métaux (CIMM) sur les peuples autochtones et l'exploitation minière

19 août 2024

Iván Arriagada

Arriagada

Président

Conseil international des mines et métaux

Rohitesh Dhawan

PDG

Conseil international des mines et métaux

Lettre ouverte sur l'adoption de la déclaration de position du Conseil international des mines et métaux (CIMM) sur les peuples autochtones et l'exploitation minière

Indigenous Peoples Rights International (IPRI) et les organisations signataires ci-dessous expriment leur profonde inquiétude concernant la Déclaration de Position sur les Peuples Autochtones et l'Exploitation Minière (MPS) récemment adoptée par l'ICMM. Bien que la version finale de la MPS comporte des améliorations par rapport à la version préliminaire, elle reste fondamentalement incompatible avec ce qu'elle declare rhétoriquement à plusieurs reprises comme des engagements clairs en faveur du respect des droits des peuples autochtones.

L'IPRI et d'autres organisations autochtones se sont engagées de bonne foi avec l'ICMM, en fournissant des commentaires écrits, des contributions et en participant à des réunions en présentiel et virtuelles concernant le MPS. Au cours de ces discussions, l'IPRI, ainsi que d'autres organisations et dirigeants autochtones, ont clairement souligné que la MPS doit respecter pleinement les droits des peuples autochtones, indépendamment de la reconnaissance de l'État. Un aspect clé de ce respect est la mise en œuvre du consentement libre, préalable et éclairé (CLPI), garantissant que les communautés autochtones ont le droit sans équivoque de dire non aux projets miniers qui affectent leurs terres et leurs ressources, ainsi que leur patrimoine culturel, qui doit être respecté par les États et les entreprises.

Malgré ces demandes claires et fermes de la part des représentants autochtones, la version finale de la MPS prévoit un processus dans lequel la décision des communautés autochtones de refuser leur consentement peut être annulée par l'entreprise ou autorisée par l'État. Cette situation est très préoccupante, car elle permet aux activités minières de se dérouler en violation des droits des peuples autochtones à leurs terres, à leurs ressources, à leur patrimoine culturel et à leur autodétermination. La MPS semble donc redéfinir le CLIP non pas comme un véritable processus de consentement, mais comme un mécanisme permettant de faire pression sur les communautés autochtones pour qu'elles acceptent le projet, sachant que celui-ci peut se poursuivre quelle que soit leur opposition. La MPS sert donc d'outil aux sociétés minières pour affirmer leur pouvoir de porter atteinte aux droits des peuples autochtones lorsqu'ils ne donnent pas leur consentement, au lieu de ce qu'elles prétendent être le respect des droits des peuples autochtones.

L'IPRI reconnaît que la MPS a partiellement abordé diverses questions, y compris des améliorations relatives à la définition du processus de consentement libre, préalable et éclairé. Il s'agit notamment de reconnaître que "Les peuples autochtones ont le droit de retirer leur consentement en cas de non-respect des conditions établies ou de modification de l’ampleur des impacts sur leurs droits."[1] En outre, l'engagement 4 indique à juste titre que " Conformément aux principes du CLIP, l’accord doit être obtenu au moyen d’un engagement éclairé et significatif et d’une négociation de bonne foi … qui permettent de donner ou retirer facilement et librement son consentement”. Ces moyens doivent comprendre " la preuve du consentement aux impacts anticipés, les mesures d’atténuation élaborées dans le cadre du processus de diligence raisonnable et un mécanisme de recours en cas d’infractions potentielles à l’accord ou aux droits des peuples autochtones".

Néanmoins, l'engagement 4 est rendu inutile par l'engagement 5, lorsque les peuples autochtones refusent leur consentement. " reconnaissent que la conclusion d’un accord et l’attestation du consentement peuvent permettre l’établissement de relations à long terme basées sur le respect mutuel, la confiance et le gain. Par conséquent, les membres de l’ICMM partiront du principe que les projets ou activités proposés doivent se poursuivre avec l’accord décrit dans l’Engagement 4. Reconnaissant qu’il existe des circonstances dans lesquelles un accord peut ne pas être obtenu, le présent énoncé de position définit le processus que les membres de l’ICMM adopteront dans ce cas”.

Comme le précisent les notes explicatives, cela inclut notamment d'élaborer "une politique ou une approche qui décrit les mesures appropriées à prendre et la façon dont elles géreront les impacts dans les circonstances où les peuples autochtones ne donnent pas leur accord quant aux impacts anticipés sur leurs terres ou d’autres droits". Les alternatives pour les membres de l'ICMM comprennent la "médiation", "poursuivre des processus conçus par les États pour de telles situations" ou même " de faire remonter les problèmes aux plus hauts décideurs concernés au niveau de l’entreprise … pour qu’ils décident de la manière dont l’activité doit évoluer". Ils peuvent également procéder dans des situations où "les États pourraient déterminer qu'un projet devrait être autorisé sans consentement". En fin de compte, cela accorde l'autorisation à une entreprise de poursuivre un projet sans l'accord des peuples autochtones concernés et un engagement superficiel à "évaluer pleinement [les risques] conformément aux politiques et procédures établies".

Ce traitement du CLIP est injuste et incompatible avec les droits des peuples autochtones tels qu'ils sont établis dans les normes internationales en matière de droits de l'homme. Le CIMM et ses membres, par le biais de cette déclaration de position, ont clairement décidé de poursuivre les violations flagrantes des droits et les injustices qui ont historiquement caractérisé les interactions des peuples autochtones avec l'industrie minière. La déclaration de principe, telle qu'elle est rédigée, réduit le prétendu engagement de l'ICMM à respecter les droits des peuples autochtones à une simple rhétorique, puisqu'elle permet le mépris sélectif de ces droits lorsqu'ils entrent en conflit avec les intérêts des entreprises ou des États. Les droits des peuples autochtones sont inhérents, interdépendants et doivent être respectés dans leur intégralité - aucune entité, qu'il s'agisse d'un État ou d'une entreprise, n'a le pouvoir de choisir lesquels de ces droits seront respectés ou ignorés.

Nous réitérons donc notre demande que les compagnies minières mettent correctement en œuvre le processus de CLIP et respectent pleinement la décision collective des communautés affectées, y compris la décision de ne pas donner son consentement. Nous continuerons à nous engager auprès de l'ICMM et de ses membres pour exiger qu'ils respectent pleinement les droits des peuples autochtones, en particulier dans le contexte de l'exploitation des minerais essentiels à la transition, dont plus de 60 % se trouvent à l'intérieur et à proximité des peuples autochtones.

 

Signé par :

Individus:

  1. Alexander Arbachakov, Russia

  2. Anne-Marie Tupuola, NZ/USA

  3. Barbara Shaw, Canada

  4. Catherine Murupaenga-Ikenn, Aotearoa, New Zealand

  5. Concepción Suarez, México

  6. Cristhian González Gómez, Costa Rica

  7. Cristina Coc, Belize

  8. David Solis-Aguilar, Costa Rica

  9. Enrique Vela, Ecuador

  10. Florence Daguitan, Philippines

  11. Isabel Palavecino Gatica, Chile

  12. Jimmy Ginting, Indonesia

  13. Maria Farfán, Argentina

  14. Maria Mercedes Carusso, Argentina

  15. Maureen Loste, Philippines

  16. Michelin Sallata, Indonesia

  17. Mija Ednam Baer, Sweden

  18. MONSERRAT BORJA, México

  19. Nicolas Gadea, Argentina

  20. Norman Jiwan, Indonesia

  21. Pablo Sibar, Costa Rica

  22. Rajani Maharjan, Nepal

  23. Victoria Pereira, Uruguay

Organisations:

  1. Accountability Counsel, United States

  2. Ambeua Helewo Ruru Foundation, ID

  3. APALAC COALITION, Pays Bas

  4. ARTICLE 19, United Kingdom

  5. Asamblea Nacional Indígena Plural por la Autonomía (ANIPA-México, México

  6. Asia Indigenous Peoples Network on Extractive Industries and Energy (AIPNEE), Philippines

  7. Asociacion del Centro de Desarrollo Integral de la Mujer Aymara "Amuyt'a" CDIMA, Bolivia

  8. Asociación Fuerza de Mujeres Wayuu, Colombia

  9. Asociación ProPurus, Peru

  10. Ação dos Jovens Indigenas, Brazil

  11. Batani Foundation, Russia/USA

  12. Borok Indigenous Tiprasa peoples' Development Centre, NE India

  13. Center for support of indigenous peoples of the North, Russia

  14. Centro de estudios independientes Color tierra, Colombia

  15. Cirdinadora nacional de mujeres indígenas de panama, Panama

  16. Community Empowerment and Social Justice Network (CEMSOJ), Nepal

  17. CONFEDERACION DE PUEBLOS AUTOCTONOS DE HONDURAS CONPAH, Honduras

  18. Confederation of Indigenous Nationalities of the Ecuadorian Amazon, Ecuador

  19. Continental Network of Indigenous Women of the Americas, ECMIA., Perú

  20. Continental Network of Indigenous Women of the Americas, United States

  21. COORDINADOR DEL AREA DE LOS PUEBLOS ORIGINARIOS RED ONGs AMERICA LATINA, El Salvador

  22. Coordinadora Andina de Organizaciones Indígenas - CAOI, Perú

  23. Coordinadora Socioambiental Biobío, Chile

  24. Cordillera Peoples Alliance, Philippines

  25. Cordinadora Andina de Organizaciones Indígenas CAOI, Colombia

  26. Cuenca de Salinas Grandes y Laguna de Guayatayoc, Argentina

  27. Divest Invest Protect, USA

  28. Diálogo y Movimiento, A. C., Mexico

  29. Environmental Defender Law Center, Brasil

  30. Federación de Comunidades Nativas de Ucayali y Afluentes-FECONAU, Perú

  31. Federación Indígena Empresarial y Comunidades Locales de México. A.C., México

  32. Forest Peoples Programme, United Kingdom

  33. Foro Indígena Abya Yala FIAY, El Salvador

  34. Foro para el Desarrollo Sustentable AC, México

  35. Foro Social de la Deuda Externa y Desarrollo de Honduras, Honduras

  36. Friends of the Earth Sierra Leone, Sierra Leone

  37. Fundación Camino del Agua, Ecuador

  38. Future Group, Australia

  39. Gobierno Ancestral Plirinacional de las naciones indígenas Originarias. Maya Akateka, Maya Chuj, Maya Q'anjob'al, Maya Popti', Territorio Maya Q'anjob'alano/Guatemala.

  40. Greater Whange Residents Trust, Zimbabwe

  41. Grupo Intercultural Almaciga, España

  42. Inagkodi/Kabugao Youth, Philippines

  43. Inisiasi Masyaraka Adat (IMA), Indonesia

  44. INNABUYOG-Alliance of Indigenous Women's Organization in the Cordillera Region,Philippines, Philippines

  45. Instituto para el Futuro Común Amerindio IFCA, Honduras

  46. International Work Group for Indigenous Affairs (IWGIA), Danmark

  47. Lawyers’ Association for Human Rights of Nepalese Indigenous Peoples (LAHURNIP), Nepal

  48. Linguismo, USA

  49. London Mining Network, United Kingdom

  50. Mandera county human rights network, Kenya

  51. Mayma. Humanidad Emprendedora, Argentina

  52. Nature Talk Africa, Uganda

  53. Nepalbhasa Poetry Foundation, Nepal

  54. Not1More, UK

  55. Organización de Mujeres indígenas Mano de Tigre (Dbön Orcuo, Costa Rica

  56. Peace Advocate Youth Organization, Philippines

  57. Proyecto sobre Organización, Desarrollo, Educación e Investigación (PODER), Mexico

  58. Right Energy Partnership with Indigenous Peoples (REP), Philippines

  59. San Youth Network, Botswana

  60. Sierra Leone Land Alliance, Sierra Leone

  61. Sisters of Mercy of the Americas Justice Team, International

  62. The Khoeporation, Republic of South Africa

  63. TIPD-Turkana Indigenous People Action for Development, Kenya

  64. Zomi Human Rights Foundation, India

*avec 17 personnes et 13 organisations non divulguées



[1] Déclaration de position de l'ICMM sur l'exploitation minière par les peuples autochtones. (Voir les déclarations de reconnaissance selon lesquelles les membres de l'ICMM reconnaissent que "Le consentement libre, informé et préalable (CLIP) constitue une norme des droits humains dérivée de divers droits fondamentaux conférés aux peuples autochtones, et il fonctionne comme un processus qui protège les droits fondamentaux des peuples autochtones, y compris leurs droits d’accès aux terres, aux ressources et au patrimoine culturel. Grâce à des processus de diligence raisonnable guidés par les principes du CLIP, les peuples autochtones peuvent participer de manière significative à la prise de décisions et consentir librement, ou non, aux impacts anticipés sur leurs droits et aux modalités selon lesquelles ces impacts seront gérés. Le maintien de l’accord est une responsabilité mutuelle permanente. Les peuples autochtones ont le droit de retirer leur consentement en cas de non-respect des conditions établies ou de modification de l’ampleur des impacts sur leurs droits.”)

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